Des parfums

Je me souviens de mon premier voyage au Japon, l’été 2010, l’excitation et l’émotion qu’on ressent quand on arrive dans un nouvel endroit.  J’ai lu quelque part que seule la langue française dispose d’un mot pour décrire ce sentiment: le dépaysement.  Avant les paysages, les gens, c’est l’odeur qui te prend.

L’odorat est intimement lié à nos souvenirs et a un impact fort sur nos émotions. Un parfum seul peut appeler un sentiment et changer notre état.

Quand tu regardes par la fenêtre du train reliant Narita à Tokyo, tu aperçois d’abord de grandes étendus vertes, les rizières clairsemées de quelques maisons traditionnelles, ces maisons de bois au grand toit en tuiles noires. L’odeur de l’iode, de l’été chaud et humide mêlé à la végétation locale est saisissante.

Ensuite, il y a la ville, Tokyo, les immenses buildings, la Yamanote, le Shibuya crossing, les lumières, le bruit, l’impression d’être une cigale au milieu de la fourmilière. L’odeur de la foule, du métal, des yakitoris et les parfums artificiels des magasins achève de te faire voyager.

En voyageant un peu j’ai passé :

Un printemps à Osaka et ses odeurs de takoyaki, sur le nampabashi celle des hormones des jeunes qui s’enflamment.

Un automne à Shizuoka et l’odeur chaude d’un bain à ciel ouvert, des yatai et de la bière tiède du festival.

Un été à Okinawa, l’odeur du sable de la mer et d’un verre d’awamori en plein soleil.

Un hiver au yukimatsuri à Sapporo, l’odeur de la neige fraîche et de l’agneau grillé au barbecue.

4 ans après je me suis imprégné de ces odeurs, de ces paysages jusqu’à ne plus les sentir, ne plus les voir. Quand je monte dans le train, mon regard ne balaye plus le wagon dans tous les sens, je n’observe plus les autochtones et je ne m’amuse plus de leurs excentricités vestimentaires. Je ne regarde plus par la fenêtre, le nez enfoui dans mon smartphone, je me suis fondu dans la masse.

Avant même de l’avoir réalisé, j’ai déjà pris des habitudes, les visages et les allées sont devenus familiers, tout prend un sens.  C’est simple, je suis de retour dans ma zone de confort. Ou pour être plus précis, j’ai étendu les limites de ma zone de confort, j’ai tiré la couverture et maintenant je me sens au chaud. En un mot, je suis chez moi.

Je vous invite, mes très chers amis à partir à la découverte de nouveaux parfums, de nouvelles sensations, allez stimuler vos sens, ouvrez bien vos narines, fermez les yeux et prenez une grande inspiration, imprégnez vous de nouvelles odeurs. Quand vous ne sentirez plus rien, vous aussi serez chez vous et peut être il sera temps de repartir.

Shinjuku la nuit (deep tokyo)

La gare de Shinjuku, le centre de Tokyo. Des kilomètres de tunnels sur plusieurs niveaux. Dans ces tunnels des dizaines de centres commerciaux, cafés, restaurants. Un véritable labyrinthe aux centaines de sorties. Plusieurs milliers de personnes s’y rendent pour travailler, s’amuser ou tout simplement en transit. Il est possible de sortir de chez soit, prendre le métro, passer la journée à Shinjuku, faire du shopping, manger, se divertir et enfin rentrer sans avoir vu la lumière du soleil. Pour les plus chanceux, ceux qui arrivent à se frayer un chemin vers une sortie, c’est pour se retrouver  cerné par d’immenses buildings aux façades de verre, sertis d’écrans géants diffusants des publicités en boucle. J’ai erré dans ces tunnels un nombre incalculable de fois, parcouru des centaines de kilomètres à pieds, et il m’arrive encore de m’y perdre.

A l’ouest, la rue des souvenirs( 思い出横丁). Petit passage étroit où deux piétons ne peuvent pas circuler côte à côte. Vestige du vieux Tokyo, oasis au milieux de la mégalopole, de vieux izakayas traditionnels y sont alignés. Sur les devantures, des lanternes rouges, des portes coulissantes en bois et en papier de riz, ou de simples rideaux séparent les clients de la rue.
Je me suis installé dans l’un d’eux, celui qui me semblait le plus chaud, le plus accueillant, et puis j’ai bu.

 j’ai pensé à ma situation de presque trentenaire, à 12 000km de chez moi, j’ai pensé que c’était un peu comme Shinjuku, plusieurs sorties, je ne sais jamais laquelle prendre. J’ai trouvé ça con, j’ai bu encore.

J’ai pensé à ma situation situation de presque trentenaire tiraillé entre l’envie de rentrer fonder une famille et celle de partir à l’aventure.

J’ai bu a nouveau et je me suis dit qu’on part en espérant trouver des réponses aux questions. Mais je crois qu’on y trouve juste un autre angle de vu, une manière différente de les aborder.
Alors j’ai continue à boire pour enfin réaliser que le goût de l’alcool a beau être différent; ici comme ailleurs, on rigole, on pleure, on pense à des trucs stupides, bref, l’ivresse est la même.
J’ai pensé que c’était comme  tout, ici ou ailleurs, les mêmes envies, les mêmes angoisses, les même joies, bref la même vie. Y’a que l’emballage qui change.
 Alors pas de réponse à mes questions mais j’ai juste compris que ici comme ailleurs, l’ivresse est la même et à l’heure ou j’écris ces lignes, la gueule de bois surtout…
Pour les curieux, de belles images du passage des souvenirs :

Hanami

Quelques photos de Hanami 2014. Au début du printemps les sakuras fleurissent, les parcs sont alors prit d’assaut. Au programme : pique-nique et picole sous les arbres roses.

Les photos ne rendent malheureusement pas honneur car elles sont figés et la beauté réside dans la pluie de pétales roses qui tombent des arbres lorsque le vent souffle.

Voici quelques photos de Ueno et Yoyogi ou l’ambiance est terrible. Je suis également allé faire un tour pour dire bonjour à l’événement rassemblant les youtubeur du Japon et j’ai pu rencontrer des vlogger que j’apprécie comme Victor de gimmeaflakeman, et les canadiennes Sharla et Mira (kanadajin3)

DSC01968

DSC01971

DSC01975

DSC01991

DSC01998

DSC02000

DSC02008

DSC02010

dibat-sharla

Ikebukuro la nuit (deep Tokyo)

Le soleil se couche tôt ici, à partir de 17 heures les néons des enseignes prennent le relais diffusant une lumière artificielle dans les rues animées de Ikebukuro.

Au troisième étage du starbuck de la zone Est, j’admire la vue   en buvant mon café. Autour de moi un couple partage  un cheese cake, des étudiants ne lèvent pas le nez de leur bouquin, quelques amis discutent. Mes cours de japonais sont éparpillés sur la table mais j’y prête pas vraiment attention.

20130514-190459.jpg

Aujourd’hui j’suis distrait. Comme d’hab j’ai échangé quelques mots avec ma voisine de table,  feuilleté un livre sans grande conviction et observé les gens avec cette curieuse impression d’irréel; comme si j’étais assis dans mon fauteuil à regarder la télévision.

Je vais bientôt descendre, et prendre une grande inspiration avant de plonger dans la marée humaine. J’aime Ikebukuro la nuit. Les rues sont pleines, ardentes, animées. Des groupes d’amis  rassemblés devant le game center braillent ,  de jeunes couples ont oublié les conventions et se tiennent par la main,  les rabatteurs usent de leur meilleurs bagou afin de draguer les groupes de filles vers leur izakaya. Galvanisé par cette atmosphère je vais  faire un détour par sunshine street et manger un morceaux au KFC .

Je ne perds pas une occasion de pratiquer mon japonais et j’engage donc la jeune femme à côté de moi. Elle refuse de me révéler son métier mais en creusant un peu elle  fini par avouer travailler dans un club à hôtesse. Son métier et d’offrir sa compagnie à des hommes d’âge mûr. Un grand sentiment de solitude et de désillusion se dégage de cette jeune fille de 20 ans. Solitude partagé par ces salarymen prêt à débourser des sommes ridiculement élevées afin de passer un peu de temps avec le sexe opposé.

Imaginez vous la scène. Ce pauvre type passe une journée de 10 heures au bureau à se faire insulter par son boss, à lécher les bottes de ses clients. A la maison il sert la ceinture depuis belle lurette. Comprenez alors à quel point ce bonhomme aime passer ces quelques heures à être le centre de l’attention de demoiselles qui riront à toutes ses blagues, allumerons ses cigarettes et lui rempliront son verre.

Bref, retour sur l’avenue. L’heure du dernier train arrivé. tous le monde se dirige, titubant sous l’effet de l’alcool pour certains, d’un pas assuré pour d’autres, vers la gare. Pour ma part je rejoins Gaun-chan au ChoiChoi, mon izakaya préféré. Je vais passer les prochaines heures à boire des bières, manger des brochettes et refaire le monde avec mon amie.

Voilà une nuit parmi tant d’autres à Ikebukuro.

Hanabi

Dibat au Japon : Okinawa

Dibat au Japon : immigration office, les 12 travaux de Dibat

les toilettes japonaises

Balade à Otsuka

Petite balade dans mon pâté de maison, on peut voir le temple à côté de chez moi, un izakaya ou j’aime boire de temps en temps et à la fin mon bâtiment avec une vu sur le toit.

PS: Mes excuses aux puristes du montage…

L’exclusion par les baguettes.

L’exclusion par les baguettes, ou  une énième complainte d’un expat au Japon.

D’abord brève introduction. Le Japon est un pays paradoxale. Il est à la fois très accueillant pour les étrangers de passage et à la fois très excluant. J’ai étudié un texte récemment qui fait référence au concept du soto/uchi (intérieur/extérieur). L’idée du groupe est très importante pour les Japonais (uchi).  Dès la naissance on doit appartenir à un ou plusieurs groupes (ex: des clubs à l’école, l’entreprise etc…).On fait tout pour le groupe, on vie pour le groupe et par conséquent on marque bien la différence avec ce qui est en dehors du groupe (soto). Les gens de l’extérieur seront toujours très bien accueillis. On leur parle avec un Japonais très poli et on leur souri toujours mais il est très difficile de parler d’intégration. Nous, étrangers, sommes des gaijins (外人 外=extérieur 人=personne) ou en d’autres termes des personnes de l’extérieur. Il en resulte donc des attitudes qui partant d’un bon sentiment, sont en réalité extrêmement excluantes.

Bon, jusqu’ici rien de nouveau sous le soleil, je ne connais pas un blog d’expat qui ne traite pas de ce sujet. Je voulais à mon tour illustrer ce propos par une reflexion qu’on me fait souvent et expliquer pourquoi cette phrase est représentative de l’exclusion ambiante:

« お箸が使えますか?すごいー!” Vous savez utiliser des baguettes ! impressionnant !

Manger avec des baguettes n’a jamais été quelque chose d’extraordinaire. En france je ne connais pas une ville en 2013 qui ne compte pas au moins un restaurant asiatique. Pour moi ça relève de l’évidence.   Lorsqu’on me fait cette reflexion je trouve ça aussi stupide que de me dire « Oh tu sais utiliser un stylo ! ».

Evidement la volonté n’est pas d’être impoli au contraire. Il s’agit toujours d’un bon sentiment. Mais si je traduis ça veux dire que je ne suis pas censé savoir le faire puisque je suis différent. Et en fait cette reflexion te remet systématiquement a ta place. Celle de l’outsider. Mais pourtant c’est la vérité me direz vous, je viens bien de l’extérieur. Ceci étant dit, je vous assure que c’est fatiguant d’être constamment rappelé que vous n’êtes pas chez vous. Comme lorsqu’on vous demande combien de temps vous restez. Cette question paraît également innocente mais elle vous rappelle que vous n’êtes pas censé rester.

Pourtant non, je ne veux pas vivre toute ma vie au Japon ni devenir Japonais (mais j’aurai pu!?). Par contre de temps en temps j’aimerai juste être traité normalement et non comme l’étranger de service. Ni plus mal ni mieux que les autres.

Alors certe, la France à probablement ses problèmes d’intégration mais je trouve qu’ici tout est exacerbé par  cette notion de uchi/soto. Je me souviens de cette scène irréelle ou je mangeais et assistait à un concert dans un restaurant cabaret.  En face de moi, des personnes âgées se sont misent à s’exclamer de manière totalement théâtrale et exagéré à quel point c’était incroyable que je sache manger avec des baguettes. J’ai aligné deux mots de remerciement en japonais et là c’était incroyable comme j’étais doué en Japonais. J’étais extrêmement mal à l’aise, j’avais l’impression d’être un singe savant qui amuse la galerie.

A Paris on aurait jamais vu ça. Les gens et les commerçants sont mal polis et souvent rudes mais ils te traitent mal comme les autres, te parlent Français comme les autres.

Je vous invite à vous adresser à un black dans un restaurant en France et le féliciter de sa dextérité avec la fourchette, je suis sur qu’il sera ravi que vous le preniez pour un sauvage.  Demandez lui ensuite combien de temps il reste en France et félicitez le pour sa maîtrise du français…

Alors voilà, mes très chers amis Japonais, je vous remercie de votre gentillesse mais je suis beaucoup plus touché quand vous vous adressez à moi de manière naturelle et me traitez à égal.

A bon entendeur !

Dibat